I.
On ne vit
pas vieux quand on nait à Gaza.
Un beau
soir, saoul de sucs d’arilles de grenades,
Du mur de
l’apartheid aux dessins des parias,
On va
dans le désert de retour de ballade.
Le désert
pèse lourd en ce lourd mois d’été !
L’air est
parfois si fou qu’on ferme les paupières ;
La terre,
étang de cris – la ville est encerclée –,
A des
éclats de sang et des éclats de pierres…
II.
Voilà
qu’on aperçoit des geysers de fumée
Et des
chars, tout autour d’une population
Née sous
une mauvaise étoile, enterrée
Sous
l’aval de toutes les Grandes Nations…
Premier
août ! Deux mil-quatorze ! – On se laisse aller
– La peur
est de la bile et vous monte aux délires –
À penser
que peut-être on aurait dû prier,
Voire
comme l’aîné postuler au martyr…
III.
Le cœur
fou s’emballe dans son coffre de sable,
Lorsque,
perforant l’ocre et brûlante lumière,
Passe un
convoi armé de rocs inébranlables,
De
soldats tout en haine – incurable colère…
Et comme
ils vous trouvent à portée de leurs voix,
Tout en
mimant des bruits de tirs de carabine,
Ils vous
couvrent d’insultes, d’urine et crachats…
– Sur vos
lèvres alors meurent les cavatines…
IV.
Vous êtes
affolé. Le décor devient flou.
Vous êtes
affolé – vos élans les font rire –
Et vos
forces s’en vont, vous êtes tout au bout.
– Puis,
un piou à goupille vous a mis en mire !…
– Ce
soir-là…, – vous regardez le mur aux parias,
Vous
dégorgez de suc, d’arilles de grenade…
– On ne
vit pas vieux quand on nait à Gaza,
Et qu’on
s’en va dans le désert en promenade.
Notes :
Variation sur le poème « Roman » de Rimbaud : Roman à l’Orient
Variation sur le poème « Roman » de Rimbaud : Roman à l’Orient
(Extrait ELP, Recueil I "Homme de Nulle
Part", © L.F. Keenan, 2015, tous droits réservés)
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